Halloween, Toussaint, Fête des défunts : Quesako ?

Halloween, Toussaint, Fête des défunts ; Quesako ?

Chaque année, les vacances d’automne nous interrogent sur notre rapport à l’au-delà. Cependant, entre la Toussaint et la Fête des défunts, on s’y perd parfois un peu… Rajoutez par dessus-le marché cet Halloween orange et noir qui fleurit dans les vitrines des commerçants ! Quelle est la signification de tout cela ? A tout seigneur tout honneur : puisque c’est grâce à elle que nous profitons des vacances du même nom, commençons donc par la Toussaint !

La Toussaint (1 novembre)

Dès les premiers siècles du christianisme, se développe une forme de culte des martyrs. Ainsi, au 4e s en orient, et au 5 e s à Rome, il existait une fête honorant les martyrs et les autres saints. Quelques siècles plus tard, au 8e s, le pape Grégoire III dédicaça une chapelle de la basilique Saint Pierre de Rome à tous les saints. C’est alors que ce qui devint la “fête de la Toussaint” se fixa au 1 novembre dans l’occident catholique. Ensuite, vers 835, le pape Grégoire IV ordonna la célébration de cette fête dans toute la chrétienté. A cette période, le 31 octobre au soir, une “Sainte Veillée” précédait la Toussaint. Plus tard, elle deviendra la fête d’Halloween. En 1484, le pape Sixte IV dota la fête d’une octave. Enfin, en 1914, Pie XI en fit une fête de grande importance, “de précepte”.

Comme son nom l’indique, à la Toussaint, nous fêtons tous les saints ! Ces derniers peuvent être connus ou inconnus, canonisés ou non par l’Eglise catholique. Parmi eux se trouvent en effet ceux que le pape François appelle “les saints de la porte d’à coté”. Ainsi, loin de célébrer une sorte d’élite spirituelle lointaine, la Toussaint rappelle plutôt l’appel universel à la sainteté, qui concerne tous les chrétiens… Même vous et moi !  “Aussi dans l’Église, tous, qu’ils appartiennent à la hiérarchie ou qu’ils soient régis par elle, sont appelés à la sainteté. ” (LG 39) Au fond, les saints nous sont donnés comme sources d’inspiration, afin qu’à leur exemple, nous désirions être saints à notre tour. Déjà vivants dans la présence de Dieu, au ciel, ils prient pour nous.

Précisons enfin que la Toussaint, que l’on fête le 1 novembre, est distincte de la fête des morts, célébrée le 2 novembre. Mais en quoi la fête des défunts diffère-t-elle de la Toussaint ?

La Fête des Défunts (2 novembre)

L’idée d’une journée consacrée aux défunts existe dans de nombreuses cultures et spiritualités. Certaines célébrations traditionnelles des défunts sont d’ailleurs mondialement reconnues. C’est le cas par exemple du “Dia de los muertos”, fêté principalement au Mexique, mais aussi plus largement dans les communautés latino et hispanophones. Mais qu’en est-il de notre fête des défunts ?

Tout comme leurs frères juifs, les premiers chrétiens avaient coutume de proposer des veillées pour les morts. Au cours de celles-ci, des prières voire des messes étaient dites en faveur des défunts. Vers 820, on trouve d’ailleurs les premiers textes faisant mention d’un office spécifique pour les morts. Cet office, qui n’existait que localement, précédait la fête de la Toussaint. L’Eglise décida alors de distinguer clairement la fête de la Toussaint de la commémoration des défunts.

Ainsi, en 998, Odilon, l’abbé de Cluny institua une journée dédiée à la commémoration de tous les fidèles défunts, avec messe solennelle. Cette journée, fixée au 2 novembre, portait le nom de “commémoraison des décédés”. Peu de temps après, le pape Léon IX approuva cette décision ; la commémoration se répandit ainsi dans toute la chrétienté. Au XIII e siècle, elle intégra véritablement la liturgie romaine, devenant une fête universelle de l’Eglise. Aujourd’hui, la fête des défunts, appelée aussi “Commémoration de tous les fidèles défunts”, ou encore “Fête des morts” a donc lieu le 2 novembre, soit le lendemain de la Toussaint.

Traditionnellement, le 2 novembre est le jour où les familles se rendent au cimetière afin de fleurir les tombes de leurs proches. Le sens de cette fête se trouve à la fois dans la commémoration des défunts, mais aussi dans l’intercession en leur faveur. En effet, par la prière, nous demandons à Dieu de soulager et délivrer les âmes du purgatoire et de les accueillir en sa présence. Dès lors, l’esprit de cette fête est moins de nous donner le cafard que de susciter notre espérance. En effet, comme l’exprime très bien la “Méditation sur les fidèles défunts”, “Ceux qui sont passés sur l’autre rive sont aussi, et davantage, vivants que nous.” S’ils sont au purgatoire, c’est qu’ils sont déjà dans la salle d’attente du paradis ; là où nous les reverrons !

Et Halloween, dans tout ca, n’est-ce pas également la fête des morts ?

Halloween (31 octobre)

Une chose est certaine : Halloween tombe le 31 octobre, c’est à dire la veille de la Toussaint ! Pour le reste, nous allons voir qu’Halloween est un événement assez complexe. Ainsi, par exemple, les origines de cette célébration ne sont pas aisées à retracer. Il semblerait qu’elle prendrait racine dans une fête païenne, d’origine celtique, probablement célébrée en l’honneur de la divinité païenne Samain. Il s’agirait d’une célébration de la nouvelle année ainsi qu’une fête de fin de récolte, inaugurant la saison de l’hiver. Certaines sources font mention de pratiques rituelles occultes permettant de communiquer avec les morts, voire même de sacrifices humains. Cependant, il reste difficile aujourd’hui de démêler ce qui relève de la légende et de l’Histoire.

Il n’en demeure pas moins qu’aux 8e et 9e s, les pape Grégoire III puis Grégoire VI christianisèrent cette fête de Samain. En effet, le premier décala du 31 octobre au 1 novembre la fête de la Toussaint ; et le second élargit la fête à tout l’occident chrétien. Or, comme toute fête chrétienne, la Toussaint commençait la veille au soir, le 31 octobre. Cette veille de la Toussaint pris le nom de “All Hallows Eve“, ce qui signifie “la veille de la fête de tous les saints”. Par un glissement, elle devint Hallow-even (soir saint) et enfin, Halloween. A cette époque, l’Halloween christianisée était conçue pour exorciser la peur de la mort et du diable en tournant ces derniers en dérision.

Au milieu du 19e s, alors qu’ils fuyaient la grande famine d’Irlande, des Irlandais et Ecossais migrèrent aux USA. Ce faisant, ils emportèrent avec eux certaines coutumes d’Halloween (lanternes, citrouilles). A la fin du 19e s, alors que la fête d’Halloween gagnait en popularité, certains émirent des critiques virulentes quant aux origines païennes de cette fête. Les critiques vinrent en particulier de certains milieux protestants qui fustigèrent les risques de pratiques occultes d’une telle fête. Au 20 e s, Halloween se développa considérablement, dans les pays anglo-saxons mais aussi au delà. Petit à petit, tout substrat chrétien en fut expurgé. Elle devint alors une vaste opération commerciale, nourrie par un abondant folklore autour de la mort.

Aujourd’hui, beaucoup de chrétiens se demandent comment appréhender Halloween. Est-il bon de célébrer cette fête ?

Quelle attitude adopter face à Halloween

Différentes attitudes coexistent aujourd’hui chez les chrétiens :

– Certains chrétiens mettent en valeur les origines chrétiennes de la fête. Halloween aurait pour vocation originelle de rappeler à chacun sa mortalité ainsi que l’importance de l’intercession pour les âmes du purgatoire. Le Christ ayant vaincu la mort, tourner celle-ci en dérision dans une fête, fut-elle macabre, participerait à exorciser de la peur de la mort. Certes, l’évolution d’Halloween a rendue cette fête profane et commerciale. Cependant, peut-être suffirait-il simplement de la réévangéliser. Bref, il n’y aurait pas mort d’homme à y prendre part.

– D’autres chrétiens mettent en garde contre Halloween. En effet, la signification païenne de cette fête, déjà bien sécularisée, aurait été remise au gout du jour. D’aucun dénoncent l’ambiance générale morbide de la fête, comme terreau favorable à diverses démarches et pratiques spirituelles des moins recommandables (satanisme, occultisme, divination, nécromancie…). Bref, il s’agirait de veiller à préserver nos petites têtes blondes.

– D’autres enfin, prônent une solution médiane. Celle-ci consiste à ne pas s’extraire de la fête d’Halloween, ni non plus à la célébrer comme elle l’est aujourd’hui. Il s’agirait plutôt de fêter Halloween, sans nier son caractère ludique, mais à nouveau frais, dans une dynamique chrétienne.

Quelque soit la solution choisie, rappelons simplement le sage adage de Saint Paul. ” « Tout est permis », dit-on, mais je dis: « Tout n’est pas bon. » « Tout est permis », mais tout n’est pas constructif.” (1 Co 10, 23)

Par ailleurs, quoi que nous pensions d’Halloween, il est certain que nous gagnerions à remettre la fête de la Toussaint sur le devant de la scène !

Publié le : 25/10/2022