Les catholiques en font-ils trop avec la Vierge Marie ?

Les catholiques en font-ils trop avec la Vierge Marie ? La dévotion mariale a-t-elle encore un sens aujourd’hui ? Comme J.S Bach, ne faut-il pas plutôt proclamer “à Dieu seul la gloire” ? Eclairage. 

Avez-vous visionné le film “Reste un peu”, de Gad Elmaleh ? D’après son réalisateur, il ne s’agit de rien de moins qu’un film sur la Vierge Marie ! On y constate effectivement la dévotion mariale à fleur de peau de l’humoriste d’origine juive. De quoi susciter de la perplexité dans sa propre communauté, mais aussi chez bien des chrétiens. A cette occasion, une antique question revint sur le devant de la scène. Pourquoi en fait-on autant avec la Vierge Marie ? Qu’a-t-elle donc de si particulier, au fond ?

Médiatrice dans l’unique médiateur

Commençons par clarifier ceci : toutes grâces proviennent de Dieu et de Dieu seul ! La Parole de Dieu ne dit pas autre chose : “Un seul est Dieu ; un seul aussi est médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus homme.” (1 Tim 2, 5). Il n’y a qu’un seul Dieu, et Jésus Christ est le seul médiateur entre Lui et nous… Ceci étant dit, constatons que depuis toujours, Dieu se plaît à faire participer les hommes à sa propre mission. « Comme le Père m’a envoyémoi aussi je vous envoie. » (Jn 20, 21) Ainsi, d’une certaine manière, Dieu nous offre de devenir médiateurs dans l’unique médiateur, Jésus Christ !  Mais concrètement, comment cela fonctionne ?

Eh bien, lorsqu’un ami prie pour vous, par exemple, par sa prière, il devient comme un canal de la grâce pour vous. Pour les saints, c’est exactement pareil ! En effet, les saints ne sont pas morts mais bien vivants auprès de Dieu, dès aujourd’hui. “Quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais.” (Jn 11, 25-26). En ce sens, lorsque nous nous adressons aux saints, nous ne sommes ni dans la nécromancie ni même dans l’idolâtrie. Nous demandons simplement aux saints, nos amis du ciel, de prier pour nous, comme nous le demanderions à nos amis de la terre. “On lui donna beaucoup de parfums afin qu’il les offre, avec les prières de tous les saints, sur l’autel d’or qui est devant le trône.” (Ap 8, 3-4). C’est pourquoi, l’Eglise catholique autorise, et même encourage le culte des saints, tout en distinguant le culte d’adoration, réservé à Dieu seul, et le culte de vénération, celui rendu aux saints et aux anges.

D’accord, mais qu’en est-il de la Vierge Marie ? N’en fait-on pas un peu une idole ?

Marie est-elle une déesse ?

N’oublions jamais que Marie est avant tout une jeune femme juive qui avait environ de 14 ans quand tout a commencé. Certes, elle est aussi la maman de Jésus… et donc de Dieu ! Cependant, que les choses soient claires : Marie n’est pas une déesse ! N’en faites pas une sorte de demi-dieu ou de créature intermédiaire entre Dieu et les hommes, cela ne lui plairait pas ! Marie est une femme, une créature de Dieu, comme vous et moi. Ainsi, elle a connu l’inquiétude pour son enfant, comme toutes les mamans. “Sa mère lui dit : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme ton père et moi, nous avons souffert en te cherchant ! » (Lc 2, 48). Pourtant, ne dit-on pas que Marie est Immaculée Conception, préservée du péché avant même sa naissance ? A première vue, cela semble l’éloigner de nous ; personne ne pourrait se dire sans péché. Et pourtant, les apparences sont trompeuses !

Le fait que Marie soit Immaculée Conception et “pleine de grâces” (Lc 1, 28) ne fait pas de Marie une “sur-femme”; cela la rend peut-être même plus humaine que nous tous ! En effet, cela signifie que Marie est toute entière dépendante de la grâce de Dieu ; elle lui doit absolument tout, et n’a d’autre mérite que celui d’avoir dit “oui” au plan de Dieu. Loin d’être une idole, Marie est probablement le meilleur remède contre l’idolâtrie ! En effet, elle ne garde rien pour elle :  toute sa vie ne fait que nous orienter vers Dieu ; en nous invitant à nous laisser façonner par la grâce. Lorsque nous disons “Marie”, elle dit “Dieu” dit ainsi Grignion de Montfort. « Ce rôle subordonné de Marie, l’Église le professe sans hésitation» (LG 62). Ainsi, comprenons bien que le culte  marial n’enlève rien à Dieu. En contemplant Marie, nous ne contemplons rien d’autre que l’œuvre de Dieu en elle.

Alors la question demeure : pourquoi en faisons-nous autant avec Marie ?

Marie, modèle pour les chrétiens

Marie est avant tout un modèle pour la vie chrétienne. En effet, toute sa vie n’a été qu’un grand “oui” à Dieu. “Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. »” (Lc 1, 38) Marie est à la fois humble, douce, attentionnée, mais aussi audacieuse, persévérante, courageuse. Une femme de foi, d’espérance, et d’amour. Comblée de grâces, elle nous apprend l’obéissance à la volonté du Père, l’imitation du Fils et la docilité à l’Esprit Saint. Marie fait partie de ceux que l’Ancien Testament appelle les Anawim, c’est à dire, une “pauvre de Dieu” ; une mendiante de la grâce qui, parce qu’elle a conscience de n’être rien, attend tout de Dieu. Sa vie est écoute et mise en pratique de la Parole de Dieu. “Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur.” (Lc 2, 19)

Présente à la crèche et à la croix de son Fils, elle représente l’Eglise, qui, au nom de toute l’humanité, accepte de se laisser aimer par Dieu et de l’aimer en retour. En ce sens, Marie est la première en chemin, celle qui nous montre que vivre en Dieu, vivre la sainteté est possible. N’oublions pas que, d’une certaine manière, nous avons la même vocation que Marie. Eh oui, à nous aussi, il est proposé “d’enfanter Jésus”, c’est à dire de le laisser grandir en nous, afin qu’il puisse rayonner sur le monde. A l’école de la Vierge Marie, apprenons à laisser toute la place à Jésus : “Sa mère dit à ceux qui servaient : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. »” (Jn 2, 5) N’ayons pas peur suivre les pas de Marie ; imitons là, pour imiter Jésus !

Mère de Dieu et mère des hommes

Pour autant, Marie n’est pas simplement un modèle ! En effet, elle n’est pas juste une ancienne figure historique inspirante, aujourd’hui morte. Elle est la mère de Jésus et la mère de Dieu, la Theotokos. C’est à ce titre que la Tradition chrétienne a toujours honoré la Vierge Marie. C’est aussi la raison pour laquelle elle a une place un peu particulière (de chouchou diront certains) parmi les saints. Marie est donc la mère de Dieu, ce qui est, déjà en soi, une raison suffisante de la vénérer ! Cependant, elle n’est pas seulement la mère de Dieu, elle est aussi notre mère. “Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui.” (Jn 19, 26- 27)

Une des dernières paroles de Jésus avant de mourir fut de donner Marie comme mère à son disciple. A travers saint Jean, image de l’Eglise, c’est à tous les chrétiens que Jésus dit “voici ta mère”. En effet, à vous aussi, et à moi, Jésus nous donne sa mère pour mère, en nous proposant de prendre Marie chez nous. Enfants du Père et frères et sœurs de Jésus, nous devenons aussi enfants de Marie. Ainsi, en Dieu nous est donné un Père céleste, mais aussi une mère. Déjà durant sa vie sur terre, Marie nous montre qu’elle est une maman attentionnée qui porte les besoins concrets des hommes devant son Fils. “Or, on manqua de vin. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. »” (Jn 2 ,3). En cela, la Vierge Marie est une “intercesseuse” hors pair ! Aujourd’hui encore, elle écoute nos doutes, nos questionnements, nos demandes et les porte devant son Fils Jésus. Alors n’ayons pas peur de nous adresser à elle, de parler à notre maman du ciel, en toute simplicité.

Prendre Marie chez soi

Récapitulons. Nous pouvons contempler Marie comme le modèle de vie chrétienne qui nous est donné afin d’imiter Jésus. Nous sommes aussi invités à prendre Marie comme mère et à nous confier à elle comme des enfants. Après tout, Dieu est venu nous rencontrer par la Vierge Marie ; alors n’ayons crainte de suivre le même chemin, en venant à Dieu par la Vierge Marie. De la même manière qu’elle a enfanté son Fils, dans sa chair, Marie, nous enfante à la vie en Dieu, spirituellement, bien sur. De façon concrète, il y a de nombreuses manières de prendre Marie chez soi… Prier le chapelet, porter un scapulaire, orner sa maison d’une icône ou d’une statue de la Vierge. Et comme la foi chrétienne ne se vit jamais seuls, pourquoi ne pas écumer sanctuaires et autres processions mariales ? Ainsi donc, Marie est un modèle et une mère, mais elle est aussi… une reine!

Un grand signe apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles.” (Ap 12, 1) Après son Assomption, sa montée au ciel, Marie a été établie par Dieu reine du ciel. Ainsi, tout ce que nous offrons à Marie (nos dons, nos actions, nos prières…), elle les purifie, les embellit, et les donne à Dieu. Nos pauvres dons se trouvent alors offerts à Dieu dans un emballage cadeau de grande classe… Comment ne pourraient-il pas plaire au Tout Puissant ? C’est pourquoi, un grand saint appelle la Vierge Marie notre “trésorière du ciel”. C’est peu dire qu’elle est bien plus fiable que la meilleure banque céleste, alors n’hésitons pas à confier à notre reine les rênes de nos vies ! En ce sens, si nous le souhaitons, nous pouvons nous consacrer plus particulièrement à Jésus par les mains de Marie.

Je te choisis aujourd’hui, ô Marie,
En présence de toute la cour céleste
Pour ma Mère et ma Reine…

Alors les catholiques en font-ils trop avec la Vierge Marie ? Nous vous laissons en juger !

Publié le : 18/03/2023