Pourquoi faire bénir un objet religieux ?

Pourquoi faire bénir un objet religieux ? En des temps pas si anciens, dans nos campagnes françaises, les paysans avaient coutume de demander aux prêtres de bénir les moissons,… Aujourd’hui, d’aucun cherchent plutôt à faire bénir icône ou chapelet… Mais quel est le sens de la bénédiction ? Superstition ou pratique spirituelle digne de ce nom ? 

Peut-être vous êtes-vous déjà trouvé perplexe devant ces foules joyeusement agglutinées autour du curé dans l’espoir de faire bénir leur rameau d’olivier… Peut-être aussi, en période de rentrée scolaire, avez-vous assisté à une cérémonie de bénédiction des cartables… Il se peut, enfin, que vous ayez entendu des proches vous raconter avoir fait bénir maison, voiture, ou encore animal… Autant de situations qui ont pu nourrir votre scepticisme, ou en tout cas vos interrogations concernant les bénédictions. D’où provient cette mode de bénir des choses diverses et variées ? N’importe qui peut-il bénir n’importe quoi ? Au fond, quel sens cela a-t-il de faire bénir un objet ? Dans cet article vous trouverez des réponses à ces questions et à bien d’autres…

Mais avant de savoir ce que l’on peut ou non bénir, il est bon de nous demander ce qu’est une bénédiction…

Qu’est ce qu’une bénédiction ?

Etymologiquement, le verbe “bénir” vient du latin “bene dicere“, qui signifie “dire du bien”. Lorsque Dieu créé toute chose par sa parole, il voit sa création comme étant bonne. En quelque sorte, il en dit du bien, il la bénit!  Dans l’Ancien Testament, on voit que les bénédictions sont omniprésentes : Melchisédech bénit Abraham, Jacob bénit ses fils… Un peu plus loin, dans l’Evangile, nous voyons Jésus bénir des enfants. “Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains.” (Mc 10, 16). En bénissant, l’homme demande à Dieu sa faveur sur telle personne, telle situation, tel usage d’un objet…Cette faveur divine peut être spirituelle (demander la grâce de Dieu pour elle-même) ou plus temporelle (demander la protection, la guérison…)

 Lorsqu’elle porte sur un objet, la bénédiction fait partie de ce que l’on appelle les sacramentaux. Le catéchisme définit ces derniers comme étant « les signes sacrés institués par l’Église dont le but est de préparer les hommes à recevoir le fruit des sacrements et de sanctifier les différentes circonstances de la vie » (Catéchisme de l’Église catholique n°1677). La bénédiction est donc un rite par lequel l’Eglise, par sa prière, attire sur des personnes, des animaux, des choses, ou l’usage que l’on en fait, des faveurs divines.

Mais peut-on vraiment demander la faveur divine sur une chose ?

Que peut-on bénir ?

Tout, enfin presque tout ! Bien sur, il convient d’éviter de bénir des situations ou des objets en contradiction explicite avec les commandements de Dieu. Cependant, en dehors de ces cas particuliers, tout est “bénissable”. Les personnes, en premier lieu (enfants, missionnaires, pèlerins…) Mais il est aussi possible de bénir des animaux, des lieux (locaux, maisons), des moyens de transport… des aliments ! Ainsi, dans les évangiles, nous voyons Jésus prononcer la bénédiction avant un repas, selon la tradition juive (Mt 14, 19). Enfin, et c’est ce qui nous intéresse, il est possible aussi de bénir des objets, et notamment des objets religieux ! Loin d’être une pratique ecclésiale tardive, la bénédiction des objets est bien présente dans la Bible. Dans la Torah, n’est-il pas écrit “Bénis seront ton panier et ta huche à pain !” (Dt 28, 5) ?

Si (presque) tout ce qui existe est susceptible d’être béni, c’est tout simplement parce qu’in fine, tout est créé par Dieu. D’une certaine manière, bénir quelque chose, c’est y voir une œuvre de Dieu, que nous recevons de ses mains, et que nous lui offrons en retour. En bénissant, nous reconnaissons qu’un bien nous vient de Dieu, et nous appelons sur lui la grâce. Alors, n’hésitons pas à bénir à tour de bras, afin de sanctifier ce monde !

Ah bon, parce que tout le monde peut tout bénir ? Mmmh, c’est un peu plus compliqué que cela…

Qui peut bénir un objet religieux ?

Certaines bénédictions relèvent du sacerdoce commun des baptisés. Ainsi par exemple, en tant que chrétien, par votre autorité d’enfant de Dieu, vous pouvez tout à fait bénir les personnes autour de vous. Vous n’avez pas non plus besoin de téléphoner à votre curé pour bénir votre poulet-frites du dimanche ! Certaines bénédictions sont dites “invocatives”. Ce qui est alors bénit reçoit bien une faveur divine, mais qui ne lui confère pas un caractère sacré qui serait permanent. Probablement d’ailleurs que votre poulet frites aura une durée de vie assez limitée…

En revanche, d’autres formes de bénédictions sont réservées aux ministres ordonnés. C’est le cas de la bénédiction des objets, qu’ils soient ou non de piété. En effet, seuls les prêtres peuvent utiliser les prières de bénédiction spécifiquement prévues par l’Eglise ; éventuellement avec imposition des mains et utilisation d’eau bénite. On peut alors parler de bénédictions dites constitutives. Ces dernières confèrent à une personne, un lieu ou un objet un caractère sacré permanent. Par la bénédiction, l’objet cessera alors d’être strictement profane. Directement ou indirectement, il devient relié au culte divin.

En résumé, en ce qui concerne l’icone, le chapelet, la Bible ou la statue que vous achetez en boutique monastique (le magasin Monastica Sources Vives des Fraternités de Jérusalem, par exemple ;), il s’agit d’une bénédiction permanente. Elle nécessitera donc un prêtre…

Mais pourquoi ces objets religieux ne sont-ils pas déjà bénis ?

Faut-il acheter des objets religieux bénis ?

Il y a cinq siècles, un certain Martin Luther s’est indigné, à raison, contre la pratique consistant à vendre des bénéfices spirituels ; des indulgences en l’occurrence. En effet, malheureusement, en tout temps, des chrétiens ont essayé de s’enrichir par le trafic de biens spirituels ou d’objets sacrés. Cette pratique, que l’on appelle la simonie, est réprouvée par l’Eglise. “Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement.” (Mt 10, 8) 

C’est pourquoi, la logique consiste davantage à faire bénir des objets vendus, plutôt qu’à vendre des objets bénis. Ainsi, chez Sources Vives Monastica, les différents objets que vous trouverez ne sont pas bénis. Cependant, il ne tient qu’à vous de vous rendre à l‘église Saint-Gervais à Paris, qui se trouve à quelques pas seulement. Vous y trouverez une escouade de prêtres tout disposés à bénir le chapelet, confectionné par les sœurs moniales des Fraternités de Jérusalem, que vous aurez acquis !

Et ensuite, une fois que l’on a un prêtre sous la main, qu’est ce qu’il se passe ?

Comment se déroule une bénédiction ?

A travers le rituel de bénédiction, c’est l’Eglise qui bénit, même si elle le fait au nom du Seigneur. C’est pourquoi, de manière générale, on évite de bénir quelque chose tout seul dans son coin. La bénédiction se vit comme étant un acte liturgique. Par conséquent, celle-ci a vocation a être effectuée dans un cadre communautaire, avec au minimum un prêtre et un fidèle.

Concrètement, il existe différents rituels de bénédiction, en version longue ou courte. Cependant, lors d’une bénédiction, quelque soit son format, il y a généralement proclamation d’un passage de la Parole de Dieu. Ensuite, il peut y avoir une prière de louange ou une demande d’intercession. La louange nous rappelle la bonté de Dieu qui nous offre sa grâce et ses dons afin que nous cheminions vers Lui. L’intercession vise à demander que l’usage des dons de Dieu puisse se conformer à l’esprit de l’Evangile. Enfin, vient la bénédiction à proprement parler, que le ministre prononcera en étendant les mains. En voici un exemple, que l’on trouve dans le livre des bénédictions :

« Les objets de piété que vous avez apportés à bénir expriment votre foi d’une certaine manière, car ils ont pour rôle de vous rappeler l’amour de Notre Seigneur et d’augmenter votre confiance dans l’aide de la Vierge Marie et des saints. En appelant sur ces objets et ces images la bénédiction de Dieu, il faut avant tout être attentif à donner nous-mêmes le témoignage de vie chrétienne qu’on est en droit d’attendre de nous, si nous nous servons de ces objets. » (R/ 1168).

“Les objets de piété expriment votre foi”. Qu’est ce que cela peut bien vouloir dire ?

Bénédiction et superstition 

Soyons clairs : c’est d’abord notre relation personnelle avec Dieu qui nous permet de vivre de sa grâce. En ce sens, la bénédiction est toujours orientée vers la gloire de Dieu et notre sanctification. L’objet béni n’est qu’un moyen signifiant la bénédiction divine pour les personnes qui la demandent dans la foi. C’est pourquoi, il est important de réfléchir au sens de notre dynamique spirituelle lorsque nous faisons bénir un objet. Est-ce que nous souhaitons servir Dieu ou nous servir de Dieu ?

Pour faire simple, comprenons que la bénédiction porte moins sur l’objet en lui-même que sur la personne qui en fera usage. Ecartons toute idée que l’objet pourrait avoir par lui-même une sorte de pouvoir spirituel ou magique. L’objet béni n’est pas une amulette ! Ainsi, bénir une voiture, c’est avant tout demander au Seigneur d’accompagner la route de ceux qui en feront usage. Cela ne signifie pas que vous avez une assurance 100% garantie que vous éviterez les accidents si vous conduisez comme un chauffard !

Mais alors quel est l’intérêt de faire bénir un objet ?

Pourquoi bénir un objet religieux ?

Au fond, bénir un objet consiste à exprimer la souveraineté de Dieu sur toute chose. Tout vient de Dieu et tout revient à Dieu. Certes, cela peut nous faire sourire de voir un prêtre bénir une voiture. Cependant, il est très beau de se dire que si tout est susceptible d’être béni, c’est parce que tout ce que nous vivons intéresse Dieu. Oui, même un trajet en voiture ! L’Eternel nous accompagne dans chaque moment de notre vie, dans les grandes choses comme dans les petites. Dieu nous fait don de sa création, pour que nous en usions conformément à sa volonté. A travers la bénédiction, nous cherchons à connecter l’usage d’un objet, fut-il banal, à la volonté de Dieu. C’est donc rien de moins que l’amour et la bonté de Dieu qui se manifestent à travers l’objet béni.

Alors, que Dieu vous bénisse !

Que le Seigneur te bénisse et te garde !
Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne en grâce !
Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix !” (Nb 6, 24-26)

Publié le : 08/10/2022